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Lire nous apprend-il à vivre ensemble ?
mardi 2 mai 2006
Moi, je dis que oui et je le prouve…
Au commencement m’est venu le bruit. Marrant d’en faire avec sa bouche ! Encore plus amusant, plus tard, de se rendre compte qu’avec certains bruits copiés sur ceux des adultes on pouvait avoir ce que l’on voulait. Ces nouveaux bruits, les adultes appelaient cela la « parole ».
Mon problème est venu très tôt : je fabriquais trop de bruits avec ma bouche. Et mes adultes de ma maison m’ont vite fait comprendre qu’il fallait en faire beaucoup moins, voire pas du tout.
Puis est venu le CP. C’est le moment où on apprend à faire de bruit à partir de ce qui est écrit. Les choses ne se sont pas arrangées, pour moi, à la maison. Car non seulement je continuais à faire mes bruits habituels mais en plus je fabriquais le bruit de tous les écrits qui me tombaient sous la main.
A ce moment-là, je n’étais vraiment pas sûr que lire me permettait de mieux vivre dans ma famille.
C’est venu plus tard, quand j’ai découvert que je pouvais me parler les écrits dans ma tête sans mettre en marche ma bouche.
Et c’est là que tout s’est arrangé dans ma vie à la maison. Quand j’entendais un adulte me dire « Mais tais-toi un peu ! », ou « Tu me saoûles avec tes histoires ! », je cherchais autour de moi s’il n’y avait pas un petit quelque chose à lire. A table, je me fixais sur les étiquettes de la boîte à sel, d’une bouteille ou de la boîte à camembert et je lisais. Ma bouche se fermait et mes parents se calmaient. Une fois terminée la lecture de mon étiquette, je pouvais remettre en marche ma boîte à mots. Mes parents avaient eu leur dose et leur pause de silence.
Moi, je le dis : Lire nous apprend à vivre ensemble. Parce que quand on lit, on se tait.
Mais maintenant, il va falloir que j’apprenne à lire à mes parents parce que quand je lis, eux, ils parlent. Il va donc falloir que je leur apprenne à vivre ensemble avec moi.